Portrait – Raphaël Mahaim, l’écologiste vaudois à l’assaut de la Berne fédérale

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Après quatorze années au sein du Grand Conseil, l’élu Vert siégera au Conseil national à partir de mars. Certains l’auraient pourtant bien vu au Conseil d’État.

À Berne, celui qui exerce également le métier d’avocat souhaite tout mettre en œuvre pour amener la Suisse se décarboner.
Photo: Schwarb

Un hall et des escaliers de marbre majestueux. Le sérieux des lieux menant au bureau de Raphaël Mahaim tranche avec la bonhommie du personnage. Avocat, homme politique et père de famille, l’homme joue sur plusieurs tableaux.

Âgé de 38 ans, il grandit dans le village d’Echichens, sur les hauteurs de Morges. À l’époque, il est fan de foot et membre du club de son village. «J’ai fait toutes les classes d’âge jusqu’à jouer avec les actifs. Après mes études, j’ai arrêté parce que ça faisait trop et j’ai repris une quinzaine d’années plus tard avec les «+30». C’était toute une équipe de copains. Le foot, pour moi, c’est bien plus que des simples souvenirs d’enfance.»

À treize ans, Raphaël Mahaim part une année pour les États-Unis, au sud de New York, où son père est appelé pour des raisons professionnelles. Cette expérience américaine, une étape charnière dans sa vie. «La force, dans ces régions des États-Unis  –  et c’est ce qui m’a beaucoup marqué –, c’est cette capacité à respecter l’autre dans sa diversité. Jusqu’à l’équivalent de notre 11P, c’est un système qui ne connaît pas de niveaux comme chez nous avec la VG et VP. On était tous ensemble. Pour l’intégration des nouveaux venus et des parcours alternatifs, c’est hyper riche. Dans une vie, il y a des marqueurs avec un avant et un après. Cette expérience en est un.»

Il mène deux bachelors d’un coup

Quelques années plus tard, après un voyage au Vietnam avec celle qui est aujourd’hui son épouse, il peine à trouver sa voie universitaire. «Je suis passé par tous les états d’âme et je choisis d’abord la théologie. Je voulais faire des études qui posent la question du sens: qu’est-ce qu’on fait là? Pourquoi on est là? Il y avait la volonté de ne pas avoir une optique utilitariste des études.» Il ne mettra finalement jamais les pieds dans un cours théologie.

J’ai rarement vu quelqu’un embrasser une cause ou son travail avec autant de passion. Il a un esprit foisonnant, sans cesse à l’affût et est facilement capable de se trouver une passion dans quelque chose de nouveau. Pour cela, il n’hésite pas à sortir de sa zone de confort

Michel Chavanne, avocat

Sous l’influence de ses amis rencontrés au gymnase, il choisit finalement le droit à l’Université de Lausanne (ndlr: UNIL) et réussit sa première année. Mais la question du sens revient: «Je suis allé au service administratif de l’UNIL pour changer de faculté. On m’a donné un formulaire où il y avait la case ‘’Je reste inscrit dans mon ancienne faculté’’. Je l’ai coché dans l’esprit de continuer le droit pour voir si la suite me plairait et j’ai commencé les sciences de l’environnement – car j’avais déjà des convictions écolos assez fortes.» Il affronte les deux cursus de front et enchaîne environ 25 examens par session pendant trois ans. On commence à voir se dessiner un vrai boulimique de travail. «J’ai rarement vu quelqu’un embrasser une cause ou son travail avec autant de passion. Il a un esprit foisonnant, sans cesse à l’affût et est facilement capable de se trouver une passion dans quelque chose de nouveau. Pour cela, il n’hésite pas à sortir de sa zone de confort», décrit Michel Chavanne, son ancien maître de stage et avec qui il est maintenant associé dans une étude d’avocats.

De jeune élu à ténor du parlement

La politique au sens partisan viendra à la fin de ses années universitaires. «Ce qui m’a tout de suite parlé chez les Verts, c’est un projet de société qui voulait penser différemment. J’ai toujours conçu l’écologie comme une manière de repenser les rapports sociaux, notre économie ou encore notre agriculture.»

En 2007, il se présente aux élections cantonales et permet aux Verts du district de Morges de décrocher un troisième siège de député. S’ensuivent alors quatorze années au Grand Conseil où il se bat notamment pour un meilleur soutien en faveur des écoles de musique ou contre les exonérations fiscales faites aux grandes entreprises. Quand on lui demande s’il a une grande fierté, celui qui a quitté la place du Château à la fin du mois de novembre préfère employer une autre formule. «J’ai plutôt le sentiment du devoir accompli. Pour moi, un parlement c’est le lieu où l’on redéfinit en permanence les règles du contrat social, comment on va vivre ensemble. Le rôle du député doit être de se soucier de l’intérêt général et j’ai l’impression de l’avoir fait, alors bien sûr à mon modeste niveau et avec des échecs.» Un avis que partage son collègue de parti et candidat au Conseil d’État Vassilis Venizelos. «Il est probablement un des meilleurs orateurs et débatteurs du parlement et il laisse souvent ses contradicteurs sans réponse. Raphaël est aussi un stratège doté d’un flair politique redoutable qui lui permet de faire avancer ses idées, toujours dans le respect de ses adversaires.»

Quand on siège dans un Exécutif, je pense que le Canton pour lequel on travaille devient la priorité; mes enfants sont trop jeunes pour subir cela

Raphaël Mahaim, futur conseiller national

En mars prochain, Raphaël Mahaim prendra la direction du Conseil national pour succéder à Daniel Brélaz. Pourtant, des élections cantonales se profilent en terres vaudoises et la conseillère d’État – Verte – Béatrice Métraux est sur le départ. Après presque quinze ans au Grand Conseil, certains ont vu en l’écologiste un candidat à l’Exécutif. «L’intérêt pour la fonction existe. La décision, elle a muri lentement et a été prise de façon sereine en lien avec des considérations familiales. Quand on siège dans un Exécutif, je pense que le Canton pour lequel on travaille devient la priorité; mes enfants sont trop jeunes pour subir cela. Je ne conçois pas leurs années d’enfance en étant absent», confie celui qui est père de trois enfants de respectivement dix, huit et deux ans.

Sous la Coupole fédérale, le futur conseiller national souhaite mettre en avant les causes qui lui sont chères. «Évidemment, le combat climatique. Ce qui me sidère, c’est qu’on est dans un pays avec des moyens globalement élevés, des hautes écoles exceptionnelles. Si on n’est pas capable de mettre en place une transition volontaire alors personne ne le sera. Je veux m’engager avec d’autres en faveur d’un plan pour sortir du carbone dans tous les secteurs: construction, énergie, transports etc.»

Raphaël Mahaim lors du procès des « tennismen » du Credit Suisse. Photo: KEYSTONE/Valentin Flauraud

En 2020, l’avocat a défendu les militants écologistes qui avaient simulé une partie de tennis dans une succursale lausannoise du Credit Suisse. Un événement qui résonne avec l’actualité et les premières condamnations des zadistes du Mormont – sept d’entre eux ont été largement blanchis ce lundi 24 janvier. «C’est la métaphore d’un bateau qui fonce dans l’iceberg et l’équipe au commande ne réagit pas. Dans les cabines, il y a des personnes conscientes du problème qui veulent qu’on change de cap, mais le capitaine les ignore alors ils font le foin sur le pont pour se faire entendre. On verra ce que l’histoire en retiendra, mais ça a été un tournant déterminant dans la prise de conscience des enjeux.» Raphaël Mahaim, lui aussi, vit son propre tournant politique, celui des débuts de son histoire bernoise.

Biographie

1983: naissance à Lausanne

1996-1997: séjour d’une année aux États-Unis

2002: début des études de droit à l’UNIL

2007: élection au Grand Conseil vaudois

2014: obtention d’un doctorat en droit de l’environnement

2015: obtention de son brevet d’avocat

2022: entrée au Conseil national

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