Pascal Strupler: «Il y aura toujours des hausses de primes»

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Un souvenir de son voyage en Namibie décore sa salle de réunion bernoise. Sous la supervision d’un porte-parole, le directeur de l’OFSP, Pascal Strupler, pointe deux coûts du système de santé sur lesquels économiser en priorité: les opérations stationnaires et le prix des génériques. © Romain Carrupt

MALADIE Pascal Strupler, directeur de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), évoque ses pistes pour limiter les coûts à la charge de l’assurance de base. Alors que les Suisses n’ont plus que 28 jours pour changer de caisse.

Vous avez annoncé votre démission le 23 octobre. Lassé d’annoncer des hausses de primes chaque automne, depuis dix ans?

Si ça avait été le cas, je n’aurais pas démissionné cette année! Grâce aux mesures que nous avons prises pour contenir les coûts de la santé, l’augmentation presque traditionnelle des primes n’a pas eu lieu pour 2020. Autre bonne nouvelle à mon actif: les campagnes de
prévention sont plus efficaces. Elles ont par exemple permis de diminuer drastiquement les
cas de sida. Je ne pars pas sur un constat d’échec.

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En 2020, les primes augmenteront globalement de 0,2%, avec de grandes disparités entre les régions. Les assurés peuvent-ils encore rêver qu’un jour la facture baissera pour tout le monde?

Il y aura toujours des hausses, car les salaires qui constituent une grande partie des coûts de la santé augmentent. Mais l’allongement de l’espérance de vie et le progrès technique
jouent bien évidemment aussi un rôle décisif. Notre objectif est de limiter les augmentations. Nous y arriverons si le Parlement soutient nos propositions de réformes et si tous les acteurs jouent le jeu.

Les dépenses de santé 2017 en chiffres. © OFS

Chacun de ces acteurs a l’habitude de rejeter la responsabilité sur les autres. Y a-t-il des domaines dans lesquels les économies sont les plus urgentes?

Il faut agir dans tous les domaines. Au niveau hospitalier par exemple, de grandes économies sont possibles, en transférant des opérations du stationnaire à l’ambulatoire. Le
Conseil fédéral s’est déjà engagé dans cette voie.

Quoi d’autre?

Il faut réduire le prix des génériques, deux fois plus élevés en Suisse que chez nos voisins.
Nous avons proposé au Parlement de fixer un prix de référence basé sur les prix pratiqués
à l’étranger, en leur retranchant un certain montant, en fonction du volume du marché. Le patient qui voudrait l’original paierait la différence, sauf si son médecin lui prescrit l’original pour des raisons médicales. Les économies potentielles se situent entre 300 et 500 millions par an, soit une centaine de francs par ménage. Mais je m’attends à des débats nourris au Parlement.

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Ces génériques ne représentent qu’un quart du volume des médicaments, alors qu’ils sont en moyenne 70% moins chers. Est-ce parce que les pharmacies ont intérêt à vendre les produits les plus onéreux?

Il est vrai que les pharmacies réalisent de meilleures marges avec les originaux. Avec la faîtière pharmaSuisse – qui se soucie évidemment du revenu de ses membres – et les assureurs, nous cherchons des solutions qui permettraient de renforcer la part de marché
des génériques. Mais dans un pays riche comme la Suisse, il faut aussi comprendre que la
population veut le meilleur. Pour beaucoup de gens, cela signifie l’original, même si le principe actif des deux produits est identique.

«Les tarifs que nous proposent les pharmas sont parfois fantaisistes. Mais c’est difficile de le prouver.»

Financièrement, c’est un problème, car vous ne pouvez pas fixer de prix de référence pour un médicament breveté…

Nous pouvons quand même baisser le prix, si le médicament n’est pas assez efficace,
adéquat et économe par rapport à l’offre préexistante, ou si les prix proposés par l’industrie
pharmaceutique sont trop hauts en comparaison avec les prix à l’étranger. Les tarifs que
nous proposent les pharmas sont en effet parfois fantaisistes. Mais c’est difficile de le
prouver, vu que les prix publiés par les pays étrangers ne tiennent pas compte des rabais,
qui sont souvent considérables. Nous devons absolument renforcer la coopération
internationale pour lutter contre cette opacité.

En attendant, deux initiatives populaires sont au stade de la récolte de signatures. Celle du PDC propose de freiner les coûts de la santé. Celle du PS demande d’octroyer des subventions pour que les primes ne dépassent pas 10% du revenu des ménages. Est-ce que l’une de ces pistes vous convainc davantage?

Le Conseil fédéral se prononcera officiellement si elles aboutissent. Je constate qu’elles
sont complémentaires.

Pour beaucoup de Romands, la caisse unique demeurera toujours une autre solution à la baisse des primes…

Les assurances ne représentent qu’une petite partie des frais de santé, et elles sont aujourd’hui surveillées plus strictement. Je n’ai pas l’impression que cette discussion soit
encore d’actualité.

Personne ne parle non plus de rationnement des soins. Y arrivera-t-on un jour?

Ce n’est bien sûr pas l’objectif. Pour s’en prémunir, il faut absolument renforcer la maîtrise
des coûts, soutenir les propositions du Conseil fédéral et limiter l’offre du volume des prestations injustifiées du point de vue médical, qui conduit, il est vrai, à une augmentation de la demande.

«les soins palliatifs sont préférables à l’acharnement thérapeutique, parfois poussé par les médecins.»

Un autre tabou entoure les soins prodigués la dernière année de vie des patients. Ils concentrent à eux seuls 25% des dépenses de santé, mais il paraît impensable d’y toucher…

C’est une discussion difficile qu’il faudra approfondir. Le patient, ses proches et son médecin devraient discuter davantage. Se demander si, dans certaines situations, une opération prolongeant la vie d’un mois est réellement souhaitable. Les soins palliatifs sont
préférables à l’acharnement thérapeutique, parfois poussé par les médecins.

Autre option controversée: les primes adaptées au mode de vie. Des assurances complémentaires récompensent déjà les comportements sains. Est-ce qu’à terme la tendance s’emparera de la LAMal?

Je pense que la population tient au principe de solidarité de l’assurance de base. Contrôler
le mode de vie de tout le monde ne me paraît pas souhaitable. Personnellement, je
préfère miser sur l’incitation à la prévention.

Vous craignez qu’on vous épie?

Je fais de la gym tous les matins entre 5 h 30 et 6 heures, et des randonnées le week-end.
J’ai arrêté de fumer il y a vingt ans et essaie, pas toujours avec succès, de ne pas travailler une fois que j’ai quitté mon bureau. Par contre, je dois avouer que je ne mange pas que des fruits et légumes!

Et allez-vous changer de caisse-maladie pour l’année prochaine, comme en général moins d’un Suisse sur dix?

Non, je n’ai jamais changé d’assureur.

La Confédération combattait déjà la caisse unique en 2014:

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